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L’après 13 août : retour sur «une colère productive» avec Radhia Belhaj Zekri

Après la manifestation du 13 août à l’occasion de la journée de la femme, l’équipe de Baya a interviewé Mme Radhia Belhaj Zekri, présidente de l’AFTURD (Association des Femmes Tunisiennes pour la Recherche sur le Développement) pour recueillir ses impressions quant à cette manifestation et connaître également ses projets futurs au sein de l’AFTURD.

Baya : Tout d’abord est-ce que vous avez été à la manifestation du 13 août, si oui, était-ce pour manifester votre joie à l’occasion de cette journée ou plutôt votre colère quant à l’article qui a fait polémique à l’ANC?

Radhia Belhaj Zekri : Bien sûr que j’y étais. Nous avons beaucoup appelé à cette manifestation. C’était pour manifester de la joie parce qu’on a désormais droit à un espace de liberté dont on a été privé auparavant. Il y avait toutefois de l’inquiétude quant au statut de la femme au sein de la nouvelle Constitution. Comment ose-t-on après la révolution remettre en question des principes fondateurs que le code du statut personnel avait déjà inscrits !

Baya : donc cette inquiétude rimait avec indignation et colère ?

Radhia Belhaj Zekri : Oui, il y avait aussi de la colère mais je dirais que c’est une colère productive !

Baya : Et si revenait au CSP, est-ce que vous considérez ce texte comme un acquis à préserver ou comme une 1ère étape que la femme tunisienne essayera de dépasser ?

Radhia Belhaj Zekri : J’estime qu’on n’est plus sur le code du statut personnel mais qu’on tend plutôt vers un texte fondateur qui va constitutionnaliser les droits de la femme. Cependant, on ne va pas non se mettre à balayer ce qui a déjà été acquis. On attend de voir  si ce texte va aller de l’avant ou va nous faire reculer.

Baya : Ce texte fondateur va-t-il avoir une attache religieuse, est-ce qu’il va s’inspirer de la chariâa comme le CSP ?

Radhia Belhaj Zekri : Ce texte va surtout s’inspirer du droit international et des textes universels tels que la déclaration universelle des droits de l’Homme

Baya : Et est-ce qu’il va s’inspirer du modèle européen ?

Radhia Belhaj Zekri : Je suis très fière d’appartenir à cette culture et à cette civilisation. J’estime que le modèle européen ne correspond pas aux particularités de la femme tunisienne. Ce projet devra coller aux exigences de la femme tunisienne et du peuple tunisien. Il sera tuniso-tunisien !

Baya : Comment définissez-vous l’égalité Homme/Femme au sein de la Constitution ?

Radhia Belhaj Zekri : L’égalité est d’abord basée sur le principe de non-discrimination. La Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes me satisfait, même si en la signant, la Tunisie a eu des réserves sur quelques articles. Ce principe est avant tout universel et concerne les droits humains fondamentaux.

Baya : Le projet de Constitution proposé par l’association des femmes démocrates à l’occasion de la journée mondiale de la femme, le 8 mars dernier, vous semble répondre aux attentes de la femme tunisienne ?

Radhia Belhaj Zekri : Oui j’adhère à ce projet et nous avons même collaboré ensemble pour l’écriture de ces textes.

Baya : Vous parlez de collaboration, est-ce que vous êtes favorable à une coalition, même si le mot fait peur ces temps-ci, entre les différentes associations qui militent pour les droits de la femme ?

Radhia Belhaj Zekri : On a toujours travaillé ensemble et lors des rassemblements on a essayé de coopérer avec les différentes organisations pour viser l’essentiel. Cela dit, une coalition tendrait peut-être vers une structure immobile et cela pourrait entraver l’apport de chaque organisation. On peut envisager plutôt une structure commune en tant qu’espace d’échange constructif tout en gardant chacun ses spécificités.

Cyrine Fekih

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