Sur le trottoir en face de la cour d’appel de Tunis, ils sont peu nombreux et très peu représentatifs de l’envergure du procès historique que vit la Tunisie en ce moment.

La plupart sont des jeunes filles et jeunes garçons amis du rappeur -pardon l’accusé; on les reconnaît grâce à cette étiquette jaune collée soigneusement sur le dos de leur t-shirt ou leurs robes respectueusement. Une sorte de banderole sur laquelle est écrit : “Weld el 15 est un rappeur non un criminel”, “Sayeb el 15” (relâchez le rappeur weld el 15).

Par ailleurs, quelques journalistes, notamment des «free reporters» étaient présents, ils sont venus dans l’espoir de «médiatiser» l’affaire. On nous dit que le verdict a été reporté à 14h, il est 11h15 et nous attendons au milieu de la foule.

Facilement repérable, distingué par sa cravate et quelques plis que la robe d’avocat a laissé sur sa chemise rose, l’avocat de l’accusé est là, debout à boire un café avec à sa droite une bloggueuse, à sa gauche un trentagénaire que nous ne reconnaissons pas. Il semble calme et rassuré mais il ne faut jamais se fier aux apparences…

La Tunisie retient donc son souffle mais l’adrénaline monte, chaleur accablante et pressions, faux calme et dispositif sécuritaire important. Voilà l’ambiance qui règne.

Société civile des chimères

A présent, il apparaît évident que les journalistes ici présents sont tous indépendants –ou presque- pourquoi? Ou sont passés les autres? Cette affaire ne mérite-t-elle pas plus d’attention?

Il s’agit de la liberté d’expression, une pierre angulaire de la démocratie pour un pays qui se bat pour la liberté et la dignité depuis maintenant deux ans ou plus.

Où sont donc ces «défenseurs» qui nous ont donné l’illusion que la société civile tunisienne est forte, un comité de soutien virtuel qui fait plus de bruit derrière les écrans que dans les rues…

Où sont ceux qui nous ont accablés avec leurs statuts facebook, leurs tweets et leurs photos? Est-ce trop dur de se déplacer, d’aller au centre-ville? Alaa ne mérite-t-il donc pas ça?

On se croirait dans un roman de Guy des Cars entre accusant et accusé

De l’autre rive apparaissent les policiers, objet de la chanson de Alaa, affabulés d’une tenue bleue quelques-uns portent leurs casquettes et leurs armes, ils se tiennent debout collés les uns aux autres, ils guettent les présents d’un air méfiant, ils n’affichent aucun sourire, aucun signe de rancœur non plus.

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Le verdict tombe

Pas le temps de filmer, encore moins pour prendre des photos; silence, un policier vient crier à la foule que le verdict est tombé; ça sera donc 6 mois de prison avec sursis pour Weld EL 15, sa mère s’écrie de joie, ses amis aussi; quelques instants plus tard, l’hymne national est scandé, la foule se met en mouvement, quelques chaînes de télévisions viennent filmer «la joie».

Circulez il n’y a rien à voir

Voilà donc comme dit le dicton, tout est bien qui finit bien, Weld El 15 a écopé de six mois de prison avec sursis, terminé, même si son avocat veut passer en cassation. Le véritable crime contre la liberté d’expression, lui, n’aura pas été sanctionné. Un proverbe chinois dit : «Quand tu montres la lune à un abruti du doigt, il ne voit pas la lune mais le doigt». Malheureusement donc, ce qu’on aura retenu de cette leçon c’est «Allaa rentre enfin chez lui. Pardon pas seulement ça: la liberté a gagné une bataille!

Fin

M.E.B


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