Utilisant des supports précieux, des matériaux fragiles, la broderie a souvent été associée à une certaine idée du faste et de l’apparat. Mais aussi parce qu’elle est un moyen agréable de s’exprimer et de s’évader, la broderie semble prendre un nouvel essor. De nombreux créateurs s’attèlent à faire d’une technique de tradition un véritable artisanat de création.

Les œuvres brodées ont été racontées par des peintres, des écrivains et des poètes. Les poèmes homériques n’ont-ils pas vanté “les beaux ouvrages” et “les voiles artistiquement variés” qu’œuvraient les brodeuses de Sidon?

En Tunisie, le goût pour les broderies semble remonter à l’époque punique. Il s’est ensuite imprégné des cultures et civilisations diverses qui ont marqué l’histoire du pays au fil des âges et créé un incroyable répertoire de points, de motifs et de couleurs que les artisanes tunisiennes ont su transmettre à travers les générations. Des gestes récurrents, pas toujours répétitifs, des rituels cérémoniels qui ont tissé des destins de femmes pendant plusieurs siècles.

La broderie apparaît ainsi aux origines d’un travail artisanal ancré dans la culture tunisienne. Elle répond au goût instinctif de l’homme pour la parure. Un art aux dimensions économiques, sociales et culturelles multiples. C’est que la broderie était considérée autrefois une base incontournable de l’éducation des jeunes filles. Celles-ci fréquentaient dar el maâlma (la maîtresse-brodeuse) qui leur enseignait, dès leur plus jeune âge,  l’art de manier le fil et l’aiguille. La coutume voulait que les jeunes filles brodent elles-mêmes leur trousseau de mariage selon les techniques propres à chaque région. Et à la manière de Pénélope, la jeune fille tunisienne ornait ses étoffes en attente de son Ulysse, remplissant le vide de tissu avec mille et une croix (ghorza). En témoigne le métier à broder (gourguef) et le coussin pour la confection de la dentelle (chebka), encore présents dans la plupart des maisons.

La broderie peut aussi bien s’appliquer aux vêtements d’apparat, tels que le costume de la mariée et ses accessoires, qu’au linge de maison : parures de lit, nappes de table, napperons, fonds de plateaux,  serviettes, services à thé brodé…  Le dialogue de l’œil et de l’aiguille fait surgir les secrets de l’âme. Les supports sont en soie (el-Hrir) en laine (el-Hayek), en coton (el-Karya) ou en lin (el-Kamraya) ornementés par une broderie fine et raffinée des jours (el-Tayyal) qui reste un excellent indicateur de la qualité du travail et du métier de la brodeuse.

C.B.


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