« Dégage », de Mohamed Zran… ou plutôt « Dégage » Mohamed Zran!
Un coup de gueule, que dis-je un cri d’indignation, la dénonciation d’un scandale, une envie de hurler et de pleurer en même temps…Qu’as-tu fait Mohamed ? (on se tutoie dans la vraie vie, et d’habitude on s’aime bien), qu’as-tu-fait de notre révolution ? Comment peux tu proposer à voir, et au monde entier de surcroit, une telle ignominie !!!!

Pourquoi montrer des images de téléphone portable, d’une qualité en-dessous de ce que l’on peut attendre d’un cinéaste digne de ce nom, de gens morts, de plaies sanguinolentes, des crises d’hystérie à l’hôpital ? Pourquoi montrer des enfants instrumentalisés qui ne savent pas de quoi ils parlent, des jeunes goguenards cherchant juste à se montrer devant la caméra au lendemain d’une révolution qu’ils n’avaient pas faite, et pas ceux qui étaient vraiment là le 14 janvier ?

Pourquoi montrer des entretiens avec ceux qui n’avaient rien à raconter quand tant avaient à dire ? Pourquoi ce pathos, voyeur morbide, racoleur mais indigne de toi et d’un film qui prétend expliquer au monde notre révolution ? Pourquoi avoir joué sur le régionalisme puant et les tirages de couverture à soi… entre les avocats, les habitants de Sidi Bouzid, les syndicalistes qui revendiquent chacun l’initiative de la révolution avant tout le monde ?

De toi Mohamed, on attendait autre chose, une exploration des sentiments que tu maitrises bien d’habitude, une analyse avec du recul de ce grand moment d’histoire que nous avons vécu. Non, rien de tout cela. Tu t’appliques à interviewer les gens à terre de Kasbah 1, quand il y avait tant de gens debout, quel symbole ! Debout pour réclamer la dignité qu’ils étaient venus chercher à pied, à cheval, en voiture… tu montres des gens dans la rue enfouis dans des couvertures, sans explications… comme s’ils étaient des clochards assoupis alors qu’ils étaient juste des gens qui osaient dormir dehors en plein hiver après s’être relayés avec leurs compagnons de lutte jours et nuits. Comment n’as tu pas pensé que des étrangers y verraient autre chose que la réalité ?

Qu’as tu fait de ton devoir de mémoire, et de ta responsabilité en tant que cinéaste qui portera l’étendard de notre révolution au-delà des frontières ?  Tu l’as piétiné, notre révolution, tu l’as réduite à un soulèvement de pauvres hères, à une cour des miracles en révolte, à une manifestation de miséreux affamés. Même si la misère, le chômage, l’injustice ont leur part dans ce qui a bouleversé notre pays, le succès, si succès il y a, du 14 janvier c’est d’avoir rassemblé toutes les catégorie sociales dans un même ras le bol, une même volonté de lever la tête.

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